Pourquoi une recherche-action ?
Au regard de l’histoire de la psychiatrie en France et en Europe, toute dynamique de transformation des systèmes asilaires, reléguant et ségrégant ses « pensionnaires » en ses murs, est passée par l’implication de la société civile, par sa réappropriation de la question de la souffrance psychique.
Il est fondamental que la société, dans son ensemble, reconnaisse que la souffrance psychique est, d’une part, quelque chose qui naît et évolue en son sein et qu’elle s’interroge, d’autre part, sur la manière avec laquelle elle répond à cette souffrance en termes à la fois cliniques, juridiques et politiques.
Nous savons aujourd’hui que mettre en place des espaces transitoires, intermédiaires et créatifs, rassemblant l’ensemble des acteurs de la santé mentale et des citoyens, est une condition indispensable pour favoriser les processus d’inclusion et les changements de regards nécessaires à cette visée.
Un projet de recherche-action reposant sur des actions culturelles et des rencontres participatives codéveloppées et organisées dans différents lieux de Bordeaux Métropole nous semble répondre aux objectifs d’ouverture des institutions dans la Cité et de déstigmatisation.
En effet, si les loisirs et la culture sont des outils privilégiés pour atteindre l’inclusion sociale et des leviers pour développer le pouvoir d’agir des personnes, notamment celles en situation de handicap ou d’exclusion, le cadre de la recherche-action participe également d’un processus dynamique de co-construction de la connaissance via l’articulation des savoirs et de l’expérience des différents acteurs concernés : usagers, professionnels, chercheurs, artistes, étudiants, enseignants, formateurs, voisins, commerçants, représentants d’institutions, etc.
Cette démarche a pour objectif de contribuer à la lutte contre les stigmatisations de la psychiatrie à l’échelle de Bordeaux Métropole. Créer des ponts entre la psychiatrie/santé mentale et la Cité/société favorise les changements de regards nécessaires à l’inclusion et à la déstigmatisation. Le thème « Murs, Frontières » a une résonance toute particulière dans le champ de la psychiatrie, du handicap et de l’exclusion psychosociale. En même temps, il entre en écho avec des questions plus larges touchant au contexte social actuel dans sa globalité (migrations, covid-19, etc.).
Il s’agit d’un dispositif soutenu par un collectif invitant les personnes accompagnées, les professionnels, les chercheurs, les artistes et les habitants à concevoir puis partager des espaces communs d’expérimentation et de co-construction des savoirs, dans le cadre de plusieurs événements combinant l’action culturelle et l’éducation populaire.
Ces évènements sont déclinés à partir des axes de la recherche-action. La conférence participative d’ouverture Murs, Frontières organisée avec l’Université Populaire de Bordeaux, Errances et Exclusions ou prisons sans murs ? événements de 2018, Des rives numériques en 2019 et Identités hybrides en 2021 (organisé dans le cadre de la Quinzaine de l’égalité, de la diversité et de la citoyenneté de Bordeaux Métropole) ont réuni chacun plus d’une cinquantaine de personnes.
2022 est enfin l’occasion d’un retour sur expérience de l’ensemble du cycle Murs, Frontières afin de mettre en exergue et valoriser ce que la traversée de ce processus nous a enseigné. 2023 reste à inventer !